Shoshana Walfish
Lately you’ve been glowing

Du 30 mai au 6 juillet 2024

La Galerie Nicolas Robert a le plaisir de présenter Lately you've been glowing, une exposition de nouvelles œuvres de l'artiste peintre canadienne Shoshana Walfish, maintenant basée à Bruxelles.

Lorsque vous entrez en contact avec une autre personne, vous influencez les limites de son corps, même si vous ne le touchez pas directement. Votre humeur, le moment précis, et la géographie de chaque lieu dans lequel vous entrez déterminent la manière dont vous vous présentez à l'intérieur de cet environnement et, à son tour, votre présence a un impact sur la nature de son espace. Comme le dit la phénoménologue queer Sarah Ahmed, la peau relie aussi bien qu'elle contient. En jouant avec les outils familiers de la peinture figurative, en attirant l'attention sur des formes corporelles étranges et sur l'abstraction de l'environnement physique, Walfish détourne et subvertit les attentes de la figure dans l'espace, remettant en question les idées mêmes qui mènent à la représentation.

La lampe, se discernant plus concrètement dans l’œuvre dont le titre réfère à l’observation d’Ahmed, est notre point d’entrée dans une étude qui s’appuie sur la manière dont les gens et leurs environnements prennent part à un processus de création et de définition mutuel. Démontrant un intérêt particulier pour les réceptacles – objets qui, souvent, portent le poids des attentes sociétales et des récits historiques à l’intérieur de ses tableaux – Walfish offre, ici, dans la forme apparemment prosaïque d’une lampe domestique, un réceptacle qui, de façon plutôt littérale, à la fois contient et émet, fait partie de et créé, un espace physique occupé par des corps humains. Sa forme distincte fait partie du monde physique, affecté par les multiples phénomènes sociologiques et économiques qui structurent le moment industriel de sa création. La lumière qu’elle projette, comme sur une scène, délimite l’espace dans lequel il est donné aux figures de faire leurs propres rencontres.

Ni la lumière, ni les corps, non plus que les règles régissant l’espace qui les entoure se comportent comme il en fut longuement de mise. La lampe se fond en des formes organiques, laissant derrière des sources de lumière qui, parfois, apparaissent comme des formes solides singulières, alors qu’à d’autres moments, elles exercent leur émanation de l’intérieur même des figures. Des parties de corps nus se fusionnent avec des fonds qui se mêlent aux avant-plans des espaces physiques dont l’illusion de la profondeur persiste à contredire la rupture d’une perspective logique. Des tensions agréables caractérisent le rapprochement de mains et de pieds, comme s’ils étaient captés dans un moment d’hésitation, juste avant leur connexion. La chaleur et l’acide qui se dégage de la palette dramatiquement réduite pétillent de réactivité potentielle.

Les nus eux-mêmes ne semblent pas être dérangés par l'effondrement de leur environnement dans lequel se déploie une abstraction progressive. Walfish présente une interprétation résolument queer féministe du nu féminin : ses figures sont désérotisés, calmes et décontractées dans leur nudité, ce qui nous amène à croire en des entretiens détendus, tels que ceux vécus au sein d’une famille choisie. Elles sont en concordance les unes avec les autres, même si nous réalisons leur nature étrange. Leur peau prend une qualité vitreuse. Elles échangent leur place avec les lampes, la lumière émanant de l'intérieur d'elles-mêmes. Même dans la lutte apocalyptique de Isochronal meanderings in depths unknown, les figures sont empreintes d’une légèreté et d’une liberté qu’on ne retrouve pas chez leurs adelphes plus stables, une légèreté qui est résolue complètement dans Where form and matter coalesce, où la présence figurative persiste dans un espace entièrement abstrait. Elles revendiquent une propriété idiosyncratique et résolument personnelle de l’expérience somatique, rejetant à la fois les connotations sexualisées de la figure nue représentée et le bannissement de la métaphore des corps physiques dans la théorie féministe.

Les œuvres de petit format de Being as fluid supposent un dénouement de l'abstraction progressive des pièces plus grandes et un indice de ce qui pourrait être au cœur de celles-ci. Elles ne montrent pas l'absence d'expérience corporelle, mais en font sa quintessence. Elles suggèrent des lieux d'échange, des sites où des messages chimiques sont relayés à travers des membranes poreuses, le corps entier étant une multiplication incessante de toucher par-dessus toucher. 

Texte par Catherine Bailey Gluckman, Brussels, 2024

Traduction par Laur P, Montréal, 2024
 

Shoshana Walfish est titulaire d’un baccalauréat en beaux-arts de l’Université Concordia à Montréal, au Canada. Son travail a récemment été exposé chez Marian Cramer (Amsterdam), au Kasteel D’Ursel (Anvers) et dans une exposition individuelle au Musée juif de Belgique (Bruxelles). Elle a également exposé à la Galerie Nicolas Robert (Toronto et Montréal), à la Galerie Beige (Bruxelles), au Brussels Art Nouveau and Design Festival (Bruxelles) et à Birch Contemporary (Toronto).